Il y a des lectures qui vous happent par surprise et le roman de Jade Rosine en fait assurément partie. À travers le regard de Mica, lycéenne en apparence indifférente et solitaire, on pénètre dans un établissement scolaire qui semble banal – jusqu’à ce qu’un événement dramatique en révèle les fêlures. L’histoire d’une tentative de suicide, d’un journal intime découvert par hasard, et de confidences inattendues transforme peu à peu le quotidien en un huis clos émouvant, peuplé de voix qu’on avait cessé d’écouter. Ce qui frappe d’abord, c’est l’équilibre subtil entre la gravité des thèmes abordés — le mal-être adolescent, le poids du silence, les attentes sociales — et une touche d’humour toujours juste, souvent apportée par des scènes de cours d’Allemand délicieusement absurdes, visiblement inspirées du vécu. Cette honnêteté donne au roman un parfum d’authenticité rare. On sent que l’autrice connaît ses personnages, les aime, et ne cherche jamais à les juger. Mica devient, presque malgré elle, un point d’ancrage pour ces vies adolescentes cabossées. Et dans cette transformation, il y a quelque chose de profondément touchant : une ode discrète à l’écoute, à la lucidité, et à la bienveillance. C’est un roman d’apprentissage, mais aussi un cri doux-amer pour ne pas détourner les yeux. Le tout dans une écriture fluide, incarnée, où chaque détail sonne juste. On rit, on serre les dents, on se souvient de nos propres années lycéennes. Une première œuvre prometteuse, pleine de sincérité et d’intelligence. À lire, à faire lire, et à suivre de près — car cette romancière, c’est certain, a beaucoup d’autres choses à nous raconter.